jeudi 7 mai 2015
Quelques questions à Poutine
L’exercice en direct a duré 3 heures et 57 minutes, le 16 avril, sur toutes les chaînes publiques. Les téléspectateurs russes ont pu poser 74 questions à Vladimir Poutine. Cet exercice de démocratie télévisée était d’abord destiné à ses compatriotes. Il fallait les rassurer sur les sanctions internationales, « purement politiques » : « Les experts voient que le plus dur est passé… Les contre-sanctions doivent contribuer à évincer les produits étrangers de nos étals au profit de nos produits nationaux. »
En butte aux critiques, Poutine reconnaît que 20 à 30 % seulement de son programme a été appliqué, mais il rappelle que l’inflation a été réduite et le rouble stabilisé : « Vous proposez de réduire les dépenses et les revenus de la population, alors que pour mener une politique efficace, il faut avoir du coeur et pas seulement une tête, sinon nous retournerions aux erreurs du début des années 1990. » Ce rappel aux années noires — la période Eltsine — fait mouche auprès des “gens ordinaires”, son électorat. Les Russes savent ce qu’ils doivent à Poutine, à quoi ils ont échappé grâce à sa politique autoritaire. Pour eux aussi, il joue la franchise, après avoir baissé de 10 % son traitement de président et publié le montant de ses revenus : 139 879 euros en 2014. C’est confortable mais pas mirobolant pour celui que le magazine Time présente comme « l’homme politique le plus influent du monde ». C’est très peu pour l’“homme le plus riche du monde”, selon certains lobbys américains, qui estiment sa fortune personnelle à 175 milliards d’euros — plus de deux fois celle de Bill Gates ! En Russie, le “richissime Poutine” possède un appartement de 77 mètres carrés, un terrain de 1 500 mètres carrés, trois voitures et une remorque Skif.
Adressé aux Européens, le ton de son message sur l’Ukraine est aussi à l’apaisement : « Il n’y aura pas de guerre entre les Russes et les Ukrainiens, qui forment un seul peuple. » Pas d’avis de tempête non plus avec la France sur les Mistral, toujours immobilisés à Saint-Nazaire : « Nous ne voulons pas exiger d’amendes, mais les sommes dépensées doivent être remboursées. » Cette modération laisse à François Hollande toute latitude pour prendre sa décision, le moment venu, “quand les circonstances le permettront”.